Maturin, comme à la ferme : les produits d’ici comme projet de vie

Cet article est le premier d’une série de portraits de détaillants membres du Conseil québécois du commerce de détail (CQCD). Ce projet repose sur notre envie de vous faire découvrir l’histoire de nos PME du commerce de détail, de propriétaires et d’entrepreneur.e.s toutes et tous aussi inspirant.e.s les un.e.s que les autres, qui nous partagent leur quotidien, leurs bons coups et leurs défis.

Photo de Claudia Bernard et Jonathan L. Bélanger, copropriétaires de Maturin, comme à la ferme

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Gracieuseté Maturin, comme à la ferme | Claudia Bernard et Jonathan L. Bélanger, copropriétaires

Maturin, comme à la fermePour découvrir la magie des aliments d’ici – Ce détaillant offre un vaste choix d’aliments uniques, authentiques, frais et de qualité, produits par des fermiers et des transformateurs d’ici pour des gens d’ici et livrés partout au Québec depuis février 2018.

À la demande de ce détaillant, les mots « produits d’ici » seront utilisés dans cet article plutôt qu’ « achat local ou produits locaux » étant donné la définition trouble de ces derniers. En effet, ceux-ci sont parfois utilisés pour référer à un produit qui vient du Québec, qui a été transformé au Québec ou qui est vendu au Québec. Chez Maturin, pour s’assurer d’une définition qui réponde à ces 3 critères, ils ont choisi les mots « produits d’ici ».

La petite histoire derrière Maturin

Pour comprendre d’où vient l’idée du commerce entièrement numérique Maturin, comme à la ferme, il faut d’abord connaître les copropriétaires. Tout d’abord, il y a Jonathan, anciennement directeur numérique d’une grande entreprise de ventes en ligne et ancien éleveur et transformateur de canards. Puis, il y a sa femme Claudia, elle-même ancienne designer Web. Tous deux ont toujours été passionnés des aliments fermiers, fréquentant régulièrement les marchés publics, les fermes et les routes des vins.

Lorsqu’ils ont fondé leur famille en 2016, ils ont vite constaté qu’ils n’avaient plus autant de temps pour mettre la main sur ces aliments. Au fil des mois, ils ont aussi eu l’impression de « perdre leur vie à tenter de la gagner ». Dès lors, ils se sont mis en tête de trouver un projet agroalimentaire intéressant. Ils ont d’abord projeté d’acheter une ferme et ont rapidement constaté que la vente directe était la seule façon d’obtenir des profits satisfaisants. Mais combien de personnes se rendraient réellement sur le site de leur ferme pour faire leurs courses?

De plus, ayant eux-mêmes tenté de commander en ligne auprès des fermes qu’ils appréciaient, ils ont été confrontés à devoir multiplier les frais de livraison associés au nombre d’endroits où ils achetaient l’ensemble de leurs victuailles. 

En échangeant avec leur entourage du milieu, l’idée de vendre sur un même site Web, tous ensemble, a soulevé de plus en plus d’intérêt. Ils ont donc mis de côté leur rêve d’avoir une ferme et ainsi est né Maturin, comme à la ferme.

Le secret de ce détaillant : la gestion des opérations et de la logistique

Le couple croyait au départ se lancer dans un projet uniquement numérique. Ils s’imaginaient tout faire à partir de leur chalet. Toutefois, puisqu’ils souhaitaient offrir aux clients une seule facture et un frais de livraison commun, ils n’ont eu d’autre choix que de se lancer dans les opérations et la logistique. Selon Jonathan, la vente en ligne via un « marketplace » (un site qui agit comme vitrine commune, mais qui renvoie ensuite aux sites de chacun des fermiers et transformateurs), n’est pas viable à long terme.

Maturin gère donc également l’entreposage des produits, la préparation des commandes et la livraison. « Le secteur agroalimentaire est soumis à beaucoup de défis, entre autres en ce qui concerne la livraison. Il s’agit souvent de produits fragiles, qui demandent de rester réfrigérés ou congelés. » Eux qui ne connaissaient rien aux opérations au début de leur aventure, n’ont eu d’autres choix que d’apprendre à exceller dans ce domaine. La clé de leur succès repose donc principalement sur cette gestion des opérations et de la logistique.

Plusieurs éléments les distinguent. Tout d’abord, leur approvisionnement. « Tout est fait avec soin, tout est de qualité, jusque dans l’attention portée à l’emballage des produits. » Aussi, ils peuvent gérer de grands inventaires, tout en offrant une place de choix aux plus petites fermes. En effet, leur système de gestion d’inventaire est capable d’associer des produits semblables et de soumettre un choix similaire à l’acheteur si le produit souhaité n’est plus disponible actuellement, ce qui enlève une grande pression sur ces fermiers. « Les produits ne sont pas mis en concurrence, mais bien en complémentarité. » Maturin s’assure ainsi de pouvoir offrir des produits artisanaux.

Photo d'un panier de produits d'ici de chez Maturin, comme à la ferme

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Gracieuseté Maturin, comme à la ferme | Panier de produits d’ici

D’un côté, les fermiers et les transformateurs

Maturin a deux types de clients. D’un côté, les fermiers et les transformateurs et de l’autre, les consommateurs.

Pour les premiers, ils ont maintenant presque tous entendu parler d’eux via leurs partenaires, tels que Aliments du Québec, le Conseil de la transformation alimentaire du Québec (CTAQ), le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), l’Union des producteurs agricoles (UPA) et bien d’autres. Ils vont directement s’inscrire sur la plateforme développée par Maturin, où chacun est capable de tout faire en ligne par lui-même, comme s’il s’agissait de son propre site Web. Cette façon de procéder est une solution beaucoup moins coûteuse que d’avoir son propre site de commerce électronique et de tout opérer seul, puisque les frais sont divisés. Évidemment, la vitrine pour leurs produits est aussi beaucoup plus grande.

Chez Maturin, les critères de sélection sont les suivants : que les articles proposés soient produits ou transformés au Québec, uniques et authentiques. L’entreprise souhaite s’assurer de mettre en valeur les produits des fermes familiales et des transformateurs artisanaux.

De l’autre, les consommateurs de produits d’ici

L’été dernier, l’équipe s’est mobilisée pour tenir un kiosque dans les marchés publics de plusieurs villes. Par cette démarche, ils ont pu voir aisément quels étaient leurs « persona » et ainsi adapter leurs communications pour mieux cibler cette clientèle.

Pour rejoindre leurs consommateurs, plusieurs moyens ont été mis en place par les copropriétaires. En plus de leur kiosque estival, ils sont très actifs sur les médias sociaux, entretiennent de bonnes relations avec les médias, tiennent un blogue et ont une infolettre informative sur l’alimentation, qui présente également les nouveautés et une épicerie personnalisée aux clients.

Selon Jonathan, l’avantage principal pour les acheteurs est de garder contact toute l’année avec leurs aliments préférés. « Souvent, ils découvrent les spécialités de divers fermiers lors de séjours dans d’autres régions et n’y ont plus accès le reste de l’année. Avec Maturin, il leur est possible de continuer d’acheter ces produits toute l’année, en plus de découvrir d’autres produits d’ici. Le tout, livré directement à domicile. »

Il s’agit aussi d’un choix responsable, équitable et durable, puisque Maturin se fait un devoir que tout soit fait dans le plus grand respect de l’être humain et de l’environnement.

Photo de Jonathan L. Bélanger, président et cofondateur de Maturin, comme à la ferme

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Gracieuseté Maturin, comme à la ferme | Jonathan L. Bélanger, président cofondateur

Projet numérique de l’année lors de l’événement TAG – Regard sur le commerce d’aujourd’hui 

Le 5 octobre dernier, le CQCD a reconnu ce détaillant pour son parcours numérique. Jonathan en est fier, car ils ont développé eux-mêmes une plateforme de marché qui donne plein accès aux quelques 600 fermiers utilisateurs. Un codage complexe, propre à Maturin. Ils ont aussi su trouver de bons logiciels et développer des API qui ne ressemblent à aucune autre. Maturin garde le plein contrôle de son commerce en ligne.

« Au-delà du code, il y a toute la structure. Nous avons dû déménager plusieurs fois le serveur et créer des bases de données en « CLOUD ». Avec celles-ci, notre catalogue de près de 2 000 produits d’ici peut maintenant être utilisé par nos partenaires pour qu’ils puissent vendre ceux-ci à leurs propres clients. » Le tout a été travaillé avec l’Université McGill.

Cette année, ils ont veillé à sécuriser leur plateforme et à quadrupler la performance de leur serveur.

Les produits d’ici, vedettes des dernières Fêtes

Une des stratégies efficaces de Maturin, comme à la ferme pour la période des Fêtes a été de développer des ensembles de produits permettant la découverte de plusieurs fermes. Et surtout, de les proposer à l’avance. Ils ont fait le choix, avant même l’arrivée de l’Halloween, de déployer leur campagne de Noël. Cette stratégie a été payante. Ils ont vendu beaucoup d’ensembles-cadeaux gourmands, jusqu’à 325 en une seule journée! Sans parler de la forte demande qu’il y a eu pour leurs buffets des Fêtes. L’intérêt des consommateurs pour l’achat de produits d’ici était donc bel et bien au rendez-vous et c’est fort réjouissant!

Photo d'un panier de produits d'ici de chez Maturin, comme à la ferme

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Gracieuseté Maturin, comme à la ferme | Panier de produits locaux

Parce que tout n’est pas rose : enjeux de croissance et de main-d’œuvre

La logistique bien roulée et complètement sous le contrôle de Maturin n’est plus un enjeu pour les copropriétaires. Un des véritables défis repose plutôt sur la croissance du commerce, moins élevée en 2022. Cela, sans compter le début d’une nouvelle ronde de financement. Il s’inquiète aussi que de nombreuses fermes aient fermé leurs portes dans la dernière année, sans jamais qu’on en parle. Jonathan demeure toutefois optimiste pour 2023, car plusieurs déploiements sont à venir.

Pour ce chef d’entreprise qui compte une vingtaine d’employés, le plus grand enjeu reste toutefois la gestion des ressources humaines. Il ressent une fatigue générale chez les travailleurs. Dans la situation de pénurie de main-d’œuvre actuelle, il trouve aussi très difficile de recruter et de rivaliser avec les offres provenant de grandes entreprises, même s’il croit au retour du balancier.

À plus long terme

Jonathan voit plus grand pour l’avenir. Il souhaite que les fermes et transformateurs de tout le Canada puissent utiliser leurs services. Aussi, que toutes les familles au pays soient en mesure de manger plus sainement et plus facilement des aliments d’ici provenant de près de chez eux. Également, que les régions deviennent plus indépendantes; qu’on y retrouve une meilleure sécurité alimentaire.

Finalement, que tout l’écosystème devienne plus sain. Selon ses dires « notre système de production actuel est inefficace et détruit notre planète. On met à la poubelle 40 % des aliments que nous produisons. On reproduit sans cesse un modèle qui nous mène droit dans un mur au nom d’un coût plus bas. C’est maintenant qu’on doit se prendre en main! » À cet effet, Maturin, jette moins de 1 % de ce qui est produit et ces pertes sont dues à des erreurs humaines comme des bris.

Article rédigé par Geneviève Duval à la suite d’une entrevue réalisée avec Jonathan L. Bélanger, président cofondateur du commerce Maturin, comme à la ferme.

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